Dernière modification: 21/06/2023
L’affaire Cassis de Dijon est bien connue pour le rôle important qu’elle a joué dans la promotion du principe de reconnaissance mutuelle, mais elle a également joué un rôle immense dans la modification de l’approche de l’UE en matière d’harmonisation technique sur trois points fondamentaux :
– En déclarant que les États membres ne pouvaient justifier l’interdiction ou la limitation de la commercialisation de produits provenant d’autres États membres que sur la base de la non-conformité aux « exigences essentielles », la Cour a ouvert une réflexion sur le contenu de la future législation d’harmonisation : puisque le non-respect d’exigences non essentielles ne pouvait pas justifier la limitation de la commercialisation d’un produit, ces exigences non essentielles ne devaient plus figurer dans les textes d’harmonisation de l’UE. Cela a ouvert la porte à la nouvelle approche et à la réflexion qui en découle sur ce qui constitue une exigence essentielle et sur la manière de la formuler de manière à ce que la conformité puisse être démontrée,
– En énonçant ce principe, la Cour a clairement mis à la charge des autorités nationales la responsabilité de démontrer que les produits n’étaient pas conformes aux exigences essentielles, mais elle a également soulevé la question des moyens appropriés pour démontrer la conformité d’une manière proportionnée,
– En notant que les États membres étaient tenus d’accepter les produits provenant d’autres États membres, sauf dans des conditions bien définies, la Cour a identifié un principe juridique, mais n’a pas donné les moyens de créer la confiance dans les produits qui pourrait aider les autorités à accepter des produits dont elles ne peuvent pas se porter garantes. D’où la nécessité d’élaborer une politique en matière d’évaluation de la conformité.
Les principes de la « NOUVELLE APPROCHE »
La technique législative de la nouvelle approche, approuvée par le Conseil des ministres le 7 mai 1985 dans sa résolution sur une nouvelle approche en matière d’harmonisation technique et de normalisation, était la suite législative logique de l’affaire Cassis de Dijon. Cette technique réglementaire a établi les principes suivants :
- L’harmonisation législative devrait se limiter aux exigences essentielles (de préférence des exigences de performance ou fonctionnelles) auxquelles les produits mis sur le marché de l’UE doivent satisfaire pour bénéficier de la libre circulation au sein de l’UE,
- Les spécifications techniques des produits répondant aux exigences essentielles définies dans la législation doivent être fixées dans des normes harmonisées qui peuvent être appliquées parallèlement à la législation,
- Les produits fabriqués conformément aux normes harmonisées bénéficient d’une présomption de conformité aux exigences essentielles correspondantes de la législation applicable et, dans certains cas, le fabricant peut bénéficier d’une procédure simplifiée d’évaluation de la conformité (dans de nombreux cas, la déclaration de conformité du fabricant, rendue plus facilement acceptable pour les autorités publiques par l’existence de la législation sur la responsabilité du fait des produits,
- L’application de normes harmonisées ou autres reste volontaire, et le fabricant peut toujours appliquer d’autres spécifications techniques pour répondre aux exigences. Toutefois, dans ce cas, il lui incombera de démontrer que ces spécifications techniques répondent aux besoins des exigences essentielles, le plus souvent par le biais d’un processus faisant intervenir un organisme tiers d’évaluation de la conformité.
Le fonctionnement de la législation d’harmonisation de l’Union dans le cadre de la nouvelle approche exige que les normes harmonisées offrent un niveau de protection garanti en ce qui concerne les exigences essentielles établies par la législation. Cela constitue l’une des préoccupations majeures de la Commission dans la poursuite de sa politique en faveur d’un processus et d’une infrastructure de normalisation européenne forte. Le règlement (UE) n° 1025/2012 sur la normalisation européenne donne à la Commission la possibilité d’inviter, après consultation des États membres, les organismes européens de normalisation à élaborer des normes harmonisées et établit des procédures d’évaluation et d’objection aux normes harmonisées.